"Les remissions radicales ne sont pas de ce monde"
R Harrisson
Considérablementavarié par l'orage supercellulaire,le Blablabla survolait à très faible altitude, les îles Hawaï, dans le grand pacifique Nord.
« - Ô ! Comme c’est grand, comme c’est beau ! » C’est ce qu’avait cru entendre l’équipage, après que l'on t'ait trainée sur la passerelle, au beau milieu du vacarme que faisait le vent qui s’engouffrait dans la voilure crevée par les grêlons. Alors que le capitaine tenait juste à te montrer le survol de la petite l’île de Moloka’i, la plus déserte et la plus sauvage de l'archipel, toi, tu voyais toute autre chose ; Transilluminée par la Froussette, tu voyais ce que les autres ne pouvaient ni voir, ni soupçonner : le super continent de plastique. Tu l’as vu alors qu’il était invisible à l’œil nu, en surface. Et tu as fait part de cette découverte au capitaine Effraïm, le suppliant de te faire descendre par l'échelle de corde pour t'assurer que l'on pourrait y faire construire, à l'avenir, un centre de recherche spécialisé dans les espèces endémiques liées aux billes de plastique, et le capitaine a souri et il t'a fait, derechef, reconduire, sous bonne escorte, jusqu'à ta cabine.
La plupart des océans de la planète contiennent des tourbillons marins gigantesques, des maelstroms formés par la réunion de courants circulaires alimentés par les vents et les forces créées par la rotation de la Terre. Et tout ce qui flotte dans ces tourbillons finit attiré en son centre. Il en existe cinq. On nomme ces tourbillons : les gyres ou : "vortex". Le plus grand d’entre-eux, « Le Great Pacific Patch » est aussi appelé : le septième continent.
Karel Zeman, "Le dirigeable volé" 1966
Quand tu as eu seize ans, tu ignorais que
tu ne grandirais plus, que ton corps stopperait définitivement sa croissance. Que tu garderais la taille d’une fille
pubère, que tes seins ne défieraient jamais les lois de la gravité, que tu ne
deviendrais jamais une femme comme ta mère, la comédienne Beri Hansen. Que tu conserverais cette démarche d'éléphanteau, les pieds légèrement rentrés en dedans, les mains toujours jointes, tirant sur les manches de tes pulls; ce léger balancement du bassin d'arrière en avant, quand tu es assise et que tes yeux plongent dans le vague pour réfléchir. Et puis
il y a ta propre voix, que tu ne peux faire entendre
qu’au-delà du cri. Que tu es pareille à Oscar dans
le roman de Günter Grass : Le tambour. Mais la
comparaison s’arrête là. Tu n’as pas besoin de tambouriner pour aller prêcher dans le désert. Tu accusais les puissants d’avoir volé l’ambre de ton
enfance, mais l'aphorisme s’inverse petit à petit. Il pourrait se résumer à cette simple question : « Qu’as-tu fais, toi que voilà, de ta jeunesse ? »
Paul Verlaine et Arthur Rimbaud (Bruxelles 1873)
Le 29 février de l'année du Tigre, Martha consigne dans son journal un poème des Illuminations, celui qu'elle considère comme le plus beau poème du monde : "Départ". Elle sait qu'elle habite à l'intérieur du poème, qu'elle en est prisonnière, que chacun des mots écrits lui apparaît comme une prière, comme un sanglot rendu.
Jouez-moi SVP
Départ
Assez vu. La vision s'est rencontrée à tous les airs
Assez eu. Rumeurs des villes, le soir, et au soleil, et toujours
Assez connu. Les arrêts de la vie - ô rumeurs et visions !
Départ dans l'affection et le bruit neufs !
" crois-tu être honnête quand tu as leur sac d'avoine autour du cou ?"
Il se forme de nombreux projets autour de ton
nom, des projets de biopics, de films d’action, d’animation, d’exploitation pornographique…Quant à la liste de ceux qui voudraient ta peau, elle n'a jamais été aussi longue.
Depuis que le président Lee est mort sur le parcours 18 du golf de Salinas, tué par une balle perdue, alors qu’il s'apprêtait à rendre une fiche quasiment parfaite, tu n'as pas tardé à te
faire de nouveaux ennemis. Tancredo De Salveira, le délirant chef d’état du Tudobem
aimerait, je cite : « te bouffer les amygdales avec un Perfetto Tannat, grand cru. Quant au
Czar du Bloc Moviètique, Kiryl Trepanek, il souhaiterait te faire revivre ce
que la chienne Laïka a enduré dans le cosmos, en 1957, à bord du Spoutnik II. Tu pourrais t'en amuser, quand, ironie
de l’histoire, tu reçois cet appel masqué d’Elon Musk, t'offrant de faire
partie du prochain vol touristique à bord de sa méga-fusée Starship1, pour un vol d'une durée record de 28 heures, histoire de fêter le nouvel an chinois, loin, très loin de la Termit'Terre. Tu deviendrais ainsi la plus jeune astronaute de l'histoire de la conquête spatiale à faire la bamboula à 800 kms de la planète bleue. Tu aimes Musk. Tout comme lui, tu as saisi que : "le ciel était en haut et l'enfer en bas."
"Comme un homme autonome, une spécialité américaine qu'on rencontrait rarement en Europe"
Tu admires Musk et tu sais que vous pourrez vous comprendre tous les deux; qu'après tout, vous êtes de la même famille : deux autistes Asperger, GIR 2/3. Ce que tu ignores encore, c'est que le fondateur de Space X a une grande idée derrière la tête, que tu fais partie de ses plans et qu'il ne compte te mettre au parfum qu'une fois qu'il sera bien sûr que vous serez en orbite. Tu fais tes adieux à l'équipage du Blablabla, ainsi qu'au seul maître à bord, le légendaire captain Effraïm, qui te dévisage une dernière fois avant le départ pour s'assurer que tu es clean. Une fois rassuré, il t'embrasse comme du bon pain, ce que tu détestes, parce que tu trouves qu'il sent mauvais.
Elon Musk a convié quatre de ses plus grands investisseurs pour vous tenir compagnie sur le Starship One, pour fêter la nouvelle année du Lièvre qui s'annonce. Le gratin de la jet set, paraît-il. Il est vrai que tu n'aimes pas tellement ça, toi, t'amuser. Tu penses sérieusement que c'est une perte de temps. Tu nourris secrètement l'espoir d'entrevoir depuis la fusée, depuis le cosmos lugubre et froid, le septième continent que tu aimes et que tu considères comme les fondations d'une nouvelle Atlantide, un refuge pour tout ceux qui vivront en lien étroit avec la mère Nature, demain, bientôt, peut-être.
10, 9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 3, 1, 0 MISE à FEU
Jouez-moi SVP
Elon a dessiné et conçu lui-même les combinaisons
spatiales que vous portez. Elles ressemblent à ces doudounes Uniqlo,orange Éluard, mais tu as
très vite remarqué un léger détail ; qu’à la jointure des cuisses, à
l’emplacement même du pubis, Musk a laissé un trou, cerclé par un disque de
caoutchouc. Il n’échapperait à personne que ce trou ressemble à s'y méprendre à un Glory Hole. Lorsque tu lui demandes des explications, il essaie de te rassurer. Au départ, le vol du Starship One ne devait être composé que d'hommes et la combinaison avait été conçue essentiellement pour eux, pour satisfaire les besoins les plus urgents, car, ajoute t-il, "- Vous devez savoir que la pression, à cette altitude, comprime excessivement les vessies, ma chère. De surcroît, j'ai décidé que le champagne coulerait à flot, donc nos vessies seront mises à contribution, mais si nous visons bien, nous pourrons remplir nos flûtes, Ha ha ha ha ! " Tu avais répliqué avec une légère grimace : "Et moi, je pisse jusqu'à la Lune ?"
Elon Musk
Monsieur O’ Brian (du groupe e-Pickles Inc.), expliquait justement à Monsieur Falconetti (des assurances Stocker jr and Cheney ), comment il avait réussi dans les affaires, en créant des bulles spéculatives sur l’exploitation des mines de phosphates au Philistan. A l’office, les champagnes étaient prêts, les verrines dressées sur des plateaux d’argent et les milliardaires étaient déjà là, avec leur nœud papillon autour du cou. Monsieur Baxter (Patron de Baxter & Baxter), sortit des chiottes en réalisant une très jolie pirouette sur lui-même et lança à Elon Musk - Eh ! dit Elon, j’ viens d’avoir une idée ; que dirais-tu, la prochaine fois de mettre une remorque étanche sur Starship One?; comme ça, tu pourrais trimballer tout tes actionnaires. Waffwaffwaff !
Musk s’était marré et avait laissé échapper un pet, si fort, que le Glory Hole avait joué le rôle d’un pot d’échappement qui avait envoyé le milliardaire, par rétropulsion, dans le sas caoutchouté qui séparait la cambuse de la chambre des instruments, renversant le saut à glace et provoquant un joli ballet aérien de glace pilée. L’ambiance était à son climax. On allait enterrer cette année du tigre en faisant un tel barouf qu'on pourrait les entendre jusqu'à Alpha du centaure.
Intermezzo
Mais pensons à toi, Martha, seule au milieu de ces hommes, que tu as appris à connaître. Devant toi, à travers un hublot, la Terre. Vous survolez le continent Africain. Pas un nuage ne vient chatouiller cette oreille d’éléphant. Tu piaffes. Tu guettes le moment où vous vous trouverez juste au-dessus du continent de plastique. Tu attends. Tu te demandes combien il faudra de temps à Starship One pour atteindre la zone. Tu appelles Musk par le biais de ton micro HF, car tu voudrais lui parler. « – Qu’y a-t-il Martha, votre verre est vide ? –
Oui, mais là n’est pas la question ; quand arriverons nous sur zone ?
Vous m’avez promis ! – Mais ce n’est pas moi qui décide Martha, c’est la
rotation de la Terre ! »
Musk quitte discrètement ses invités pour te rejoindre
sur la coursive où tu passes ton temps à regarder sous les jupes de la planète. Pour
toi, cette boule de billard représente ce que la France représentait pour
Jeanne-la-pucelle, jadis : un pays chéri.
Chesley Bonestell, "Mister Smith goes to Venus" 1950
Fin de L'intermezzo
"Le monde est pareil à un concombre : aujourd'hui dans la main, demain dans le cul"
Proverbe arabe
-Venez Martha, suivez-moi dans le module Gagarine, d’où je vous promets une vue imprenable. Tututut ! ne discutez pas, vous allez comprendre!
En effet, au centre du minuscule compartiment, un gros hublot cloche, au sol, offrait une vue de la Terre à son nadir absolu, mais là où Musk bluffa Martha, c’est quand il actionna un joy stick relié à un logiciel, qui permettait à tout observateur de zoomer sur une zone précise, avec une résolution prodigieuse.
Martha s’était mise à genoux et ramassée en boule, fascinée par ce qui ressemblait à un nouveau jeu vidéo. Dans cette position elle offrait sa croupe nubilaire au nabab qui s’en émouvait profondément. Quand il aperçut la culotte blanche Petit Bateau apparaître à l’orée du Glory-Hole, il fut rattrapé par l'image de Sigourney Weaver dans Alien, quand, à la toute fin du film, elle tente le tout pour le tout pour expulser le super prédateur du Nostromo, en se glissant dans une combinaison spatiale, laissant apparaître au passage une petite culotte trop petite pour contenir sa conche. Il ne put contraindre son pénis à retourner dans son logement, tellement il bandait , ce qu’il n’avait jamais cru possible dans l’espace.
Martha était bien trop occupée à essayer d’entrevoir le septième continent, à bouger, à se pencher au mieux, à prendre des positions de plus en plus obscènes, dans l'espoir de connaître son étendue.
- Replay Ripley !
-Vous savez Martha ?
-Non, quoi Elon ?
Vous n'ignorez pas que moi aussi, je suis Asperger, et de très haute lignée, croyez-moi. J’ai toujours voulu fonder une colonie de personnes exceptionnelles, jeunes, dynamiques et entreprenantes comme vous et moi, qui iraient construire un monde meilleur, très loin de cet affreux cloaque qu’est devenue la Terre. Et mon rêve le plus cher, Martha, serait de m’accoupler, ici-même, dans l’espace, avec une nénette comme vous. D’être les tout premiers humains à procréer dans le cosmos, vous voyez ?
-Mais non, je ne vois rien justement !
-Vous réalisez ? 53 ans après le premier homme ayant marché sur la Lune: Nous deux, coïtant pour le futur de l'espèce humaine : "Un petit coup pour l’homme, mais un grand coup pour l’humanité". Hem, hem, oui, c'est de moi.
-Mais c’est pas possible ! Ya une grosse dépression en plein sur le pacifique Nord ; on y voit que dalle ! Faites quelque chose Elon, putain !
Musk s’était rapproché du Glory Hole de Martha, et il avait sa lune en pleine ligne de mire. Son sexe était raide et prêt comme jamais il ne l’avait été sur la Terre.
-Ne vous énervez-pas, jeune fille, je vais vous régler l’azimut.
Elle s’était déployée comme un criquet, au premier contact du chibre de Musk contre son intimité. Martha lui faisait face à présent - elle regarda très longtemps Musk, sans ciller, avec ce dégoût qui remontait à l’enfance, à l'époque où elle allait recracher sa nourriture pour l’enterrer dans le jardin. Sans rien dire, elle leva la main gauche très haut, avec une moue rageuse, et lui décocha une tarte en pleine gueule. Et Musk fut projeter au plafond, violement, rompant dans le choc, une conduite d’hélium liquide, qui l'éclaboussa et altéra sa voix, la transformant en une voix de fausset.
-Mais vous êtes complètement cinglée !
Il avait dû te supplier de ne rien dire, de pas faire d'esclandre auprès des convives, et pendant que le maître d'hôtel te demandait si tu prendrais le chapon ou bien le turbot, tu avais repris ta place au-dessus du hublot magique, laissant échapper une grosse larme qui s'était répandue sur l'île d'Hokkaido. Tu ne seras sûrement pas la première astronaute à copuler dans le cosmos, Martha Lindkquist, mais tu seras à tout jamais la première femme de l’histoire de la conquête spatiale à avoir connu ce sentiment d'humiliation, ce court-circuitage qui se prolongeait déjà depuis l’infini, en écho à la plus lointaine vibration d'une naine blanche.
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