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jeudi 22 février 2024

RADIO(S) BAXTER 12 : La Traversière

L   A    T   R   A   V   E   R   S   I   E   R   E





LA MEMOIRE NEUVE 1995
Dominique A

 
C'est de cette cousine de La Fouine, que tout  est parti. Pierrick, dit Bouboule de 0 à 8 ans, et dit Le Boub de 8 ans à l'infini, avait un copain de classe que tout le monde appelait La Fouine. C'était un type long et dégingandé (dont la voix était proche du cri du mustélidé), qui préférait le vélo au ballon rond, alors que Pierrick, lui, tapait dedans à pleins orteils. Malgré cette différence, la Fouine et Le Boub s'entendaient comme larrons en foire. Mais là où ça devient intéressant, c'est que La Fouine avait une cousine. Cette fille fut dans ma classe, jadis, à un stade de ma scolarité, où je n'avais pas encore l'obsession du redoublement. Ah ! cette fille avait tout simplement du génie. Et c'était surtout son oreille qui était géniale. Elle avait un don imbattable pour dénicher les meilleurs. A 14 ans, elle aurait pu déjà collaborer à Best, Rock and Folk et Paroles et Musiques, sans blague ! Tout ce qu'écoutait La Fouine provenait des recommendations de Nathalie P, son exceptionnelle cousine. Le Boub, forcément, était dépassé, lui qui ratissait faible avec NRJ ou le Top 50. Le temps passe. Le Boub et la Fouine grandissent et tout naturellement, prennent des chemins différents, Pierrick avec son sport étude de foot et La Fouine avec un vélo qu'il fait assembler sur mesure pour sa longue carcasse. Ils s'éloignent doucement l'un de l'autre, mais pas Nathalie, de son cher cousin. Un autre cadeau qu'elle lui fait est ce disque : "La mémoire neuve" de Dominique A, que la Fouine a juste le temps de refiler au Boub avant de sortir de sa vie. 
Je ne le découvre que l'été suivant, grâce à Pierrick (qui a pris le relais de son copain), complètement conquis et transformé par cette découverte. Et il ne perd pas son temps, puisqu'il profite du passage de l'artiste dans la région pour aller l'entendre successivement au Bateau Ivre, à Tours, puis au Minotaure, à Vendôme. J'achèterai l'album à Châtellerault et nous l'écouterons, Jean Esquirol et moi, ou plutôt, je l'imposerai à mon compagnon de la Route d'automne, lors d'écoutes quotidiennes, dont je ne sais par quel mystère, il ne se lassera jamais. 
                                                                            
Les Prunières à Lurais, 35 hectares de noyers
 plantés par Henri et Geneviève Cappendick
  


Lorsque nous rentrions d'une journée de labeur, à Angles sur l'Anglin (Vienne) sous les noyers des Prunières, à Lurais (Indre), le premier geste qui me venait était de faire jouer le lecteur de CD, dans lequel "La mémoire neuve" était incérée pour toujours. Janeck s'était tellement entiché du titre " Hear no more, Dear no more" (une courte chanson à deux voix, dont celle, très lumineuse, de Françoise Breut), qu'il ne tardait jamais à y associer la sienne, l'augmentant, très justement d'ailleurs, d'une nouvelle tessiture. Ainsi, à cette époque, la joie régnait dans cette bicoque de la rue Traversière (blottie entre la boulangerie et l'hôtel restaurant du village) que Jean, dit Janeck, avait baptisé : La maison du sommeil, en raison de son goût immodéré pour des siestes sybaritiques, qui l'emmenait, quelque fois, jusqu'à Katmandou. Ainsicet album était devenu, en quelque sorte, un antidote à notre fatigue et à notre abattement aussi parfois, lorsque survenaient les soudaines bourrasques ainsi que les premières pluies annonçant la fin de la longue route d'Automne et le départ inévitable de Jean pour son Ariège natal. Jusqu'à l'automne suivant,  tant désiré.

C'est dans la rue Traversière qu'on trouvait la Maison du sommeil



Jouez-moi !


Crédit : Géo portail, Show my street, 

Dominique A & Françoise Breut
Hear no more, dear no more
La mémoire neuve

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Drive In Saturday  25 novembre 1972 
LIVE à l' auditorium publique de Cleveland
David Bowie

  Je n'ai jamais pu me faire à cette chanson,  "Drive in Saturday", dans sa version studio, créditée sur l'album "Aladdin Slane", pressé  en 1973 ; je n'ai jamais pu supporter les "Dom do ah" ou  les "Got got ah aah aah" piaulés par Mike Ronson et Geoff Mac Cormack, deux des Spiders from Mars. Et je croyais mon aversion éternelle pour ce titre, jusqu'au jour où Vincent V me mijota, rue des Filles du Calvaire, une compilation dans laquelle l'album "Ziggy Stardust" figurait en bonne place parmi d'autres chansons tirées "d'Aladdin Slane". Tout au bout de cette collection, perdu dans un silence marqué, je fus surpris de tomber sur un titre "live" que tout d'abord je n'avais pas reconnu, pour la simple raison qu'il était méconnaissable ! Quand je pus enfin identifier "Drive in Saturday", je n'en croyais pas mes oreilles. La chanson ressemblait à une nef romane dissimulée au milieu d'une église de style rococo ! Malgré la piteuse qualité de l'enregistrement, l'atmosphère qui s'en dégageait, cette audience qui sentait le souffre, la présence de David,  seul sur scène, accompagné d'une guitare folk au fût bien trop gros pour son corps de gringalet, me fit songer au personnage de William Blake/Johnny Deep dans ce film incroyable de Jim Jarmusch " Dead Man". William Blake, originaire de Cleveland (!), débarque à Machine Ohio, grand Barnum minier de l'Ouest, pour y être employé comme comptable. Johnny Depp y porte un costume cockney des plus extravagants que Bowie n'aurait surement pas méprisé . 
                                                                       

Car à cet instant de revenir sur scène (sans doute pour un rappel), David Bowie, le maître du glam rock anglais, est en pleine métamorphose. Il est déjà moins Ziggy, plus Aladdin. Il se livre à ce long prélude, en direction d'un public impatient et suspendu à ses paroles, hésitantes et sincères. De septembre à décembre 1972, sa tournée le mena d'est en ouest et du nord au sud dans ce pays de fous, affamé de musique, qui en avait déjà vu passer des Beatles, des Hollies, des Stones etc. dans les années 60, lors d'une British Invasion que personne n'avait vu venir. Pourtant beaucoup de ces formations pionnières, depuis le grand pari des Beatles, s'étaient perdues à jamais au Pays des Origines du Rock'n Roll. Mais la vieille antienne de John Lennon : "Nous sommes plus célèbres que le christ " serait exhumée pour mettre un terme à ce déferlement qualifié de déloyal pour les groupes US. Ainsi l'âge d'or du rock anglais aux USA avait vécu. C'est dans ce nouveau contexte que David Bowie donne, à travers les Etats-Unis, une trentaine de concerts, lors de cette fameuse année 72. Vous dire encore que les nord-américains ne bouderont pas leur plaisir, puisqu'ils plébisciteront une nouvelle fois Bowie, lors d'une douzaine de concerts supplémentaires, l'année suivante. 
Cette version primitive de "Drive in Saturday" est un astre. Il brille à des années-lumière de celle gravée sur l'album "Aladdin Slane". Mais cette fois, l'étude s'avérera supérieure au magnum opus gravé pour la postérité. On y trouve une forme de Grâce contenue, à l'instar de celle qui hante des titres comme "Girl from the North country" de Bob Dylan, "Chelsea Hotel" de Leonard Cohen, ou "Needle and the damage done" de Neil Young. Des chansons célestes, souvent brèves, sans ornements, sans paillettes, mais qui semblent nous parvenir de la nuit des tempi.
Depuis la séparation des Fab four, David Bowie, à 25 ans à peine, aurait pu déclarer (en plaisantant) qu'il était déjà aussi célèbre que les Beatles, mais il se garda bien de faire cette blague. Un seul barde n'aurait pas le cœur à jouer plus fort que quatre ménestrels.

De Cleveland à Machine, la lente dérive de William Blake


Du quartier de Brixton à Cleveland, la rapide ascension d'Aladdin Slane 


                                                                                                       Jouez-moi !
                              

                                                                                    

Relecture : Snow Rozett